La Climate week a eu lieu dans la capitale française du 18 au 24 mai, soit un peu moins de 200 jours avant la Conférence de Paris sur le climat (COP21). Organisée par Climate Group (un network
qui regroupe des grandes entreprises multinationales, des régions, des villes…), elle se voulait une réponse à l’appel qu’avait lancé Ban Ki- moon, le Secrétaire général de l’ONU, à la
mobilisation des entreprises dans le processus mondial de décarbonation.
En ouverture du Business & Climate Summit (20-21 mai à l’UNESCO) qui a réuni 2000 chefs d’entreprise, politiques, investisseurs internationaux, le Président de la République, François Hollande, a lancé un message fort au monde économique : « Vous devez, à Paris, apporter des engagements, apporter des réponses et le succès sera aussi le vôtre. Car si nous prenons les actes qui sont attendus, si nous faisons les choix qui sont espérés, je suis sûr que cela aura des conséquences extrêmement positives sur les acteurs économiques, sur les technologies d’avenir, sur l’emploi et sur la croissance ».
Les leaders économiques réunis à ce Sommet ont, en retour, lancé plusieurs appels aux décideurs politiques pour introduire des politiques climatiques stables et prévisibles, parmi lesquelles :
• L’introduction de mécanismes de prix du carbone robustes et efficients,
pour orienter les investissements. Ce volet inclut également la suppression des
subventions aux énergies fossiles.
• L’établissement d’une alliance entre les entreprises et les gouvernements visant à
l’intégration de politiques climatiques dans l’économie mondiale.
• L’utilisation des fonds publics pour mobiliser plus de financements du secteur privé vers des actifs bas carbone, particulièrement dans les pays en développement. Ces fonds devraient dépasser les 100 milliards de dollars par an, décidés à Copenhague, afin de créer un effet de levier et rassembler les milliards de dollars nécessaires pour construire l’économie bas carbone et résiliente.
Enfonçant le clou, Paul Polman, PDG d’Unilever a déclaré : « Pour aller plus loin, nous avons besoin d’un solide accord climatique international qui envoie un message clair et crédible à tout le monde économique : les mesures bas carbone vont perdurer ».
Jean-Pascal Tricoire, PDG de Schneider Electric et Président du Global Compact France, a de son côté, confirmé que le climat avait changé dans les entreprises : « Contrairement à ce qui se passait il y a trois ans, plus personne dans le monde de l’entreprise n’ose dire que le changement climatique n’existe pas. Les entreprises ont en fait pris de réels engagements sur la réduction de leurs émissions. Avec des mesures ambitieuses, claires et de long terme pour respecter le seuil des +2°C, les entreprises créeront de la croissance, des emplois et de l’innovation continue sur la voie d’une économie prospère et bas carbone. »
Quant à Pierre-André de Chalendar, PDG de Saint-Gobain et Président d’Entreprises pour l’Environnement (EpE), il a reconnu que : « Les entreprises leaders se sont déjà engagées dans cette transition vers une société bas carbone,. Mais elles peuvent faire faire mieux. Ce Sommet appelle à une plus grande ambition ».
Ce discours appelant à un cadre réglementaire permettant aux entreprises de faire les investissements nécessaires n’est pas nouveau. Il était déjà celui qu’elles ont porté à Johannesburg (Rio + 10), en 2002! Depuis, les entreprises ont certes avancé : elles se sont fixé des objectifs de réduction des émissions des GES. Elles sont désormais demandeuses d’un prix du carbone incitatif : un rapide sondage, au Business & Climate Summit, a montré que la majorité des répondants souhaitait un prix de 40$ en 2020 et de 200$ en 2030! Les plus avancées se sont même, sans attendre, fixé un prix interne du carbone… car les conditions d’un prix mondial robuste ne sont pas atteignables avant 2019/2020, selon les experts.
Mais, au-delà des déclarations d’intention, les engagements restent encore en-dessous des objectifs fixés par les scientifiques pour limiter le changement climatique. Un rapport commun du CDP (Carbon Disclosure Project), Global Compact de l’ONU, World Resources Institute et WWF, intitulé « Mind the science », montre que si 81% des 500 plus grandes companies mondiales ont bien des objectifs de réduction de leurs émissions de GES, seuls les objectifs des plus proactives seraient en ligne avec l’objectif de rester en dessous des 2°. Le rapport montre, par exemple, que parmi les 70 entreprises les plus intensives en matière d’émission de GES (représentant globalement 9 % des émissions mondiales), seules 28 avaient des objectifs correspondant à l’objectif des 2° maximum !
Il faut donc espérer, dans ces conditions, que la conclusion de Christiana Figueres, Secrétaire Exécutive de la Convention-cadre des Nations unies pour le changement climatique sera mise en oeuvre d’ici décembre 2015 : « Nous avons atteint un tournant décisif. Les organisations réunies à ce Sommet, rassemblant plus de six millions d’entreprises, veulent travailler avec les gouvernements pour créer une rupture et ouvrir un chemin vers un avenir propre, sûr et profitable. »
Quelle est la stratégie de l’ONU et de son Secrétaire général, Ban Ki-moon, pour aboutir à un accord global et ambitieux à Paris, lors de la COP21 ?
Alain Chauveau
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